Pourquoi s’informer sur les droits des patients âgés ?

Avec l’avancée en âge, la santé devient un sujet du quotidien. Pourtant, en France, nombre de seniors et d’aidants méconnaissent leurs droits essentiels lorsqu’il s’agit de soins médicaux. Selon la Défenseure des droits, plus d’1 personne sur 2 de plus de 75 ans estime être mal informée sur ses droits en santé (Défenseur des droits). Être informé, c’est avoir les moyens de mieux se défendre, participer davantage aux choix de soins, et préserver sa dignité. Connaître ses droits, c’est aussi renforcer la qualité du dialogue avec les professionnels de santé et être acteur de son parcours, même quand le chemin se complique.

La Charte de la personne hospitalisée : le socle de droits reconnus à tous

Qu’on soit à l’hôpital, en maison de retraite, à domicile ou en consultation, la Charte de la personne hospitalisée s’applique à tous, y compris les personnes âgées. Elle résume de façon claire les droits les plus importants, depuis la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (Ministère de la Santé).

  • Droit à l’information claire et loyale : Chaque patient doit recevoir une information compréhensible sur son état de santé, les traitements possibles, les risques, les alternatives et les conséquences.
  • Consentement libre et éclairé : Aucun soin ni aucun acte médical ne peut être fait sans un accord explicite, sauf urgence vitale ou incapacité avérée. Un patient peut toujours refuser un soin, même si cela va à l’encontre de l’avis médical.
  • Droit au respect de la personne, à l’intimité et à la vie privée : À tout moment, la pudeur, l’écoute, l’individualité doivent être garanties, que ce soit lors des soins ou dans les discussions.
  • Accès au dossier médical : Chacun peut demander à consulter l’ensemble de son dossier, sur simple demande écrite auprès de l’établissement ou du professionnel concerné.

Concrètement, cela signifie qu’un senior en EHPAD, à l’hôpital ou suivi à domicile, bénéficie des mêmes droits que tout autre patient, sans distinction d’âge.

Focus sur le consentement : un droit, même à un âge avancé

Le consentement est un pilier fondamental du droit des patients. Même lorsqu’il y a perte d’autonomie ou difficultés de compréhension, ce droit demeure. Selon la loi française :

  • Le médecin doit toujours rechercher le consentement du patient, quelle que soit sa situation.
  • Si la personne âgée n’est plus en état d’exprimer sa volonté, il s’adresse à la personne de confiance préalablement désignée ou, à défaut, à la famille ou aux proches.

D’après une enquête de France Assos Santé (2022), près de 32 % des personnes de plus de 70 ans déclarent ne pas avoir reçu suffisamment d’explications avant un acte médical important.

À retenir : la personne âgée garde le droit de refuser un traitement, même si son état est préoccupant. En cas de trouble cognitif (maladie d’Alzheimer, démence…), les professionnels de santé doivent rechercher tout signe d’accord ou de désaccord et s’appuyer sur les directives anticipées ou la personne de confiance si elles existent.

Directives anticipées et personne de confiance : deux outils clés pour défendre sa volonté

Plus l’âge avance, plus il devient précieux d’anticiper d’éventuelles situations où l’on ne pourra plus s’exprimer.

  • Les directives anticipées : Il s’agit d’un document écrit dans lequel on précise, à l’avance, ses souhaits concernant la fin de vie ou les soins à recevoir (ou à refuser) en cas d’incapacité à exprimer sa volonté. Ce document, valable sans limite de durée, est consulté en priorité par les médecins.
  • La personne de confiance : Toute personne majeure peut désigner, par écrit, un proche qui sera consulté par les médecins pour témoigner de ses souhaits si elle-même ne peut plus s’exprimer. Cette désignation peut se faire en présence du personnel de santé, à l’hôpital, en EHPAD, ou même à domicile.

Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), seulement 12 % des personnes âgées de plus de 75 ans en France ont rédigé des directives anticipées. Or, leur existence permet bien souvent d’éviter des traitements non souhaités ou des conflits familiaux.

Le secret médical, quelle que soit la situation

Pour chaque patient, le secret médical est une règle absolue. Les professionnels de santé n’ont pas le droit de communiquer les informations concernant un patient à une tierce personne sans autorisation claire (sauf circonstances exceptionnelles prévues par la loi).

Pour les aidants ou la famille : il est indispensable d’obtenir l’accord écrit du patient âgé s’il est en état de le donner. Si la personne n’est plus en mesure de donner son accord, la loi encadre très strictement l’accès aux informations médicales.

Lutte contre la maltraitance et promotion de la bientraitance

Le respect et la protection des personnes âgées face aux soins passent aussi par la vigilance vis-à-vis des situations de maltraitance, qu’elles soient physiques, psychologiques, médicales ou administratives.

  • La loi reconnait à chacun le droit de recevoir des soins appropriés, sans discrimination liée à l’âge, à l’état de santé ou au handicap.
  • Une attention particulière est portée à la bientraitance dans les établissements accueillant des personnes âgées. Des “cellules éthique” existent localement pour signaler et traiter les situations problématiques (ARS).
  • Tout acte ou attitude manquant de respect, d’écoute ou de soin peut faire l’objet d’un signalement, anonymement si besoin, auprès du 3977 (numéro national de lutte contre la maltraitance des personnes vulnérables).

Selon l’OMS, près de 16 % des personnes âgées vivant chez elles ou en établissement auraient été victimes de maltraitance au moins une fois en France (source WHO).

Demander et obtenir son dossier médical : comment faire ?

L’accès au dossier médical est un droit fondamental détenu par chaque patient, y compris les plus âgés. Ce dossier contient toutes les informations recueillies lors des soins (antécédents, traitements, résultats d’examens…).

  1. La demande doit être formulée par écrit (lettre simple ou recommandée) auprès du professionnel de santé ou de l’établissement concerné.
  2. Le dossier est transmis gratuitement par voie électronique ; des frais peuvent être demandés en cas de copies papier.
  3. Le délai de transmission est en général de 8 jours (peut aller jusqu’à 2 mois pour certains dossiers anciens).

Ce droit s’applique aussi après le décès d’un patient, sous conditions strictes, pour un proche prouvant l’intérêt légitime de la demande (découvrir la cause de la mort, défendre la mémoire du défunt…).

L’accès aux soins sans discrimination : ce que prévoit la loi

A aucun moment, un patient ne peut se voir refuser des soins en raison de son âge, de ses handicaps ou de sa perte d’autonomie. Or, selon le Défenseur des Droits, plus de 15 % des plaintes traitées en 2021 concernaient une forme de discrimination liée à l’âge dans le secteur de la santé.

Les établissements de santé sont également dans l’obligation de proposer toutes les alternatives thérapeutiques raisonnables, de respecter le choix du patient (même en cas de refus d’un traitement) et d’assurer la continuité des soins.

Face à un litige ou à une situation problématique : quels recours ?

En cas de désaccord avec le corps médical, d’absence d’information suffisante, ou de sentiment de non-respect de ses droits, toute personne âgée (ou ses proches) peut :

  • Adresser une réclamation au service “Relations avec les usagers” de l’établissement
  • Contacter la Commission des usagers (CDU) au sein de l’établissement
  • Saisir le Médiateur de l’établissement ou celui de l’Assurance Maladie
  • Recourir au Défenseur des droits ou à la Commission d’Accès aux Documents Administratifs
  • Solliciter une association d’usagers ou d’aide aux personnes âgées (par exemple : France Assos Santé, ALMA, France Alzheimer…)

Depuis 2017, la médiation médicale s’est développée et permet très souvent de résoudre les situations de blocage à l’amiable, sans recourir à un contentieux long ou coûteux.

Les droits renforcés en fin de vie

Depuis la loi Claeys-Leonetti de 2016, les droits des patients en fin de vie ont été affirmés :

  • Droit à la sédation profonde et continue à la demande de la personne, dans certaines situations précises
  • Droits aux soins palliatifs (à domicile, à l’hôpital ou en établissement) dans le respect de la volonté du patient
  • Droit de refuser les traitements ou d’arrêter une prise en charge médicale devenue disproportionnée

La parole du patient prime toujours, tant qu’il peut s’exprimer ou que ses volontés sont clairement connues.

Pour aller plus loin : quelques ressources indispensables

Les droits des patients âgés : la clé d’un accompagnement digne et respectueux

Maîtriser ses droits, c’est non seulement pouvoir les faire valoir, mais aussi renforcer la confiance envers les soignants. Patients âgés ou aidants, il est possible d’être acteur de sa santé à tout âge, grâce à une bonne information et des outils accessibles. Face au vieillissement, la dignité, l’écoute et le respect ne se négocient pas : ils sont inscrits dans la loi, mais aussi dans l’exigence sociale de notre territoire.

L’information, le dialogue et l’accompagnement sont les meilleures protections pour garantir une fin de vie aussi libre et humaine que possible pour tous.

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